Le Soldat inconnu
« J’ai fait ça pour les descendants » : un maire de Charente-Maritime a retrouvé son soldat inconnu
Après une enquête de quelques mois, Philippe Chabrier est parvenu à identifier l’une des deux tombes anonymes de son cimetière. Il posera une plaque, ce lundi 8 mai, en hommage au soldat Eugène Stricane
« Mort pour la France ». Depuis plus de soixante-dix ans, voilà ce qu’on peut simplement lire sur deux tombes qui se trouvent à l’entrée du cimetière de Saint-Christophe, un petit village de 1 300 habitants, entre La Rochelle et Aigrefeuille-d’Aunis. Deux carrés de graviers, aucune épitaphe, et encore moins de décorations funéraires.
Il y a un an, au lendemain de la commémoration du 8 mai 1945 marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale, le maire Philippe Chabrier a donc décidé d’enquêter. « Cela faisait un moment que cette tombe m’intriguait. Si on lui avait attribué ce ‘Mort pour La France’, c’est bien qu’on savait qui ils étaient. Mais j’avais beau interroger les anciens, personne ne savait. Certains racontaient même qu’il pouvait s’agir d’un soldat allemand », explique l’élu. Philippe Chabrier veut en avoir le cœur net. Il est par ailleurs responsable du service des archives de la Défense, ce qui lui permet d’être très familiarisé avec ce genre de recherches historiques.
La quête durera quelques mois et le maire finira, grâce aux archives de l’armée, par élucider le mystère pour l’une des deux concessions du moins. Celui dont on ignorait l’identité depuis tant d’années s’appelle Eugène Stricane. Originaire de Lille et installé à Talence en Gironde, il était engagé volontaire dans les Forces françaises combattantes de l’intérieur. Il avait servi dans les rangs du 4e régiment FFI de Dordogne avant de venir combattre dans la fameuse poche de La Rochelle où l’armée allemande avait trouvé refuge.
Une plaque commémorative
Eugène Stricane avait 42 ans lorsqu’il fut tué par des Allemands, au lieu-dit La Panonière, dans la commune de Saint-Christophe, coincée à l’époque entre deux feux. Alors que ses voisines de Cugné et Puyvineux seront bombardées, le petit village de l’Aunis sera épargné. Mais des combats auront bien lieu. Un deuxième soldat, Paul Robert, trouvera lui aussi la mort à l’âge de 36 ans dans la commune de Saint-Christophe, mais quelques mois plus tard, le 25 janvier 1945.
Fausse joie pour le maire, qui pensait tenir là son autre soldat inconnu : ce n’est pas l’homme qui est inhumé aux côtés d’Eugène Stricane. Un amateur passionné a retrouvé trace d’un Paul Robert, correspondant à l’adjudant-chef du 108e Régiment infanterie, enterré à Aulnay-sous-Bois. L’identité de la deuxième tombe n’a donc pas encore été trouvée.
« J’ai fait ça pour les descendants et rendre hommage à des soldats morts dans l’anonymat »Pour aller jusqu’au bout de sa démarche, le maire a fait réaliser une plaque commémorative en hommage à Eugène Stricane. Elle sera posée ce lundi matin 8 mai sur sa tombe quelques minutes avant la cérémonie du 8 mai 1945. « Combattant valeureux, modèle de courage, il a participé à des combats parmi les plus meurtriers pour la libération du pays » peut-on lire sur les registres de l’armée.« J’ai fait ça pour les descendants et rendre hommage à des soldats morts dans l’anonymat », explique Philippe Chabrier. Le soldat tué à Saint-Christophe avait eu deux enfants, une fille et un garçon, tous deux disparus aujourd’hui. Mais d’autres membres de la famille sauront désormais où est enterré leur aïeul mort pour la France, grâce au travail d’un élu.
Date de dernière mise à jour : 05/06/2023