Lettre à Arthus Bertrand suite
Commentaire d'un lecteur
“Tribune : Quand une agricultrice écrit à Yann Arthus Bertrand !”
Merci Madame pour cette remarquable riposte à Yann Artus Bertrand, si vous le permettez j’aimerais vous faire part de ma réflexion sur un autre sujet : L’hystérie anti glyphosate:
Ancien agriculteur, fils et petit-fils d’agriculteur, j’ai le sentiment d’être un rescapé de l’holocauste de la chimie agricole.
Si je me fie aux publications, de chercheurs, de journalistes voir de people qui ont des points de vue sur tout, le glyphosate en particulier menacerait la survie humaine et serait un dangereux cancerogene. Pourquoi pas ? peut-être ?
Le bon sens veut qu’on juge un arbre à ses fruits en l’occurrence l’arbre glyphosate a la réputation de donner des fruits vénéneux mais qu’en est-il en réalité.
Il faut considérer depuis combien de temps cette molécule est utilisée par les agriculteurs ? Depuis 1975. C’est la génération de mon père qui a inauguré son utilisation, puis la mienne, et maintenant celle de mes enfants.
Maintenant l’utilisation de ces produits se fait avec certaines précautions, port du masque et gants, néanmoins l’agriculteur manipule de la matière active à une concentration des dizaines de milliers de fois supérieure à ce qu’un pisseur peut retrouver dans ses urines. Même en prenant des précautions l’exposition de l’agriculteur est maximum.
Je vais vous faire part de mon expérience en tant qu’empoisonneur public.
Lorsque j’exerçais mon métier, j’ai utilisé très régulièrement cet herbicide (roundup) selon les recommandations des techniciens agricoles à savoir à une dose de 5 litres de matière active mélangée à 400 litres d’eau pour un hectare traité. Un hectare c’est 10 000 m2 on peut donc imaginer la dissémination sur une telle surface et l’infinitésimale concentration dans les résidus de récolte, mais la ou je veux amener la réflexion c’est sur l’exposition de l’agriculteur 10 000 fois supérieure à celle d’un consommateur, car j’ai manipulé ainsi que la quasi-totalité de mes collègues ce produit à mains nues, la génération de mon père (actuellement 93 ans et son frère actuellement 108 ans) ont eux aussi pratiqué de même.
Alors la question qui vient à l’esprit, pourquoi ces gens avec une telle exposition ne sont-ils pas tombés raide morts au bout de leur champ ?
Je n’ai aucune accointance avec Monsanto et Bayer, je fais juste un constat et je demande à ce que l’on considère la réalité et non le phantasme que tout ce qui a permis de produire une production bon marché serait dangereux, car la réalité est qu’une agriculture sans chimie coûte beaucoup plus cher et qu’actuellement la production bio n’est accessible en terme de pouvoir d’achat qu’à 15% de la population.
La cancerogénicité du glyphosate n’est pas établie, un moyen de la confirmer ou de l’infirmer est à notre portée, je viens de montrer que la population agricole a été et est encore exposée à des milliers de fois supérieure à celle du reste de la population, il serait intéressant de voir statistiquement si la population agricole a développé depuis trois générations plus de cancers que le reste de la population.
Nous avons d’ailleurs la chance d’avoir des sources statistiques différenciées, tous les agriculteurs sont affiliés pour leur couverture maladie à la mutualité sociale agricole (MSA), j’ai la présomption qu’il ne doit pas être très difficile de répertorier les types de cancer touchant les agriculteurs et dans le régime général ceux touchant le reste de la population .
Si le chiffre affectant le monde agricole est significativement supérieur à celui du reste de la population, il sera établi que le glyphosate et plus largement la chimie agricole est à l’origine de ce différentiel et qu’il convient donc d’interdire tous ces produits.
Imaginons que ce soit le cas, quid de nos importations de soja 3,5 millions de tonnes (principalement du Brésil) quid du corn gluten feed importé des USA ? Aura-t-on la volonté d’interdire ces importations toutes produites avec du glyphosate et semences OGM ?
Je n’ai pas de formation scientifique me permettant de dire si le glyphosate est cancerogène ou pas, ce qui m’importe est de savoir si les agriculteurs sont plus touchés par le cancer que le reste de la population en insistant sur le fait qu’ils ont été beaucoup plus que d’autres exposés au glyphosate, puisqu’ils ont manipulé la matière active sans réelle protection.
Qui se souvient de la psychose de la vache folle ? de tous ces augures qui nous prédisaient sous 15 ans des dizaines de milliers de morts du prion ; rappelez-vous c’était l’hystérie, une hystérie qui avait plongé beaucoup d’éleveurs dans la difficulté et qui avait fait abattre une grande partie du cheptel bovin du Royaume Uni.
Nous sommes chaque jour invités à trembler pour des risques non avérés, la peur devient un vecteur de domination et de désespérance, nous serons bientôt tous décroissants et les plus pauvres ceux qui n’auront pas les moyens de manger bio, danseront devant le buffet
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Date de dernière mise à jour : 05/02/2021